Le pornographe

ENGLISH ITALIANO

Autrefois, quand j’étais marmot,
J’avais la phobi’ des gros mots,
Et si j’pensais «merde» tout bas,
Je ne le disais pas…
Mais
Aujourd’hui que mon gagne-pain
C’est d’parler comme un turlupin,
Je n’pense plus " merde ", pardi!
Mais je le dis.

J’suis l’pornographe,
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.

Afin d’amuser la gal’rie
Je crache des gauloiseries,
Des pleines bouches de mots crus
Tout à fait incongrus…
Mais
En m’retrouvant seul sous mon toit,
Dans ma psyché j’me montre au doigt.
Et m’crie: " Va t’faire, homme incorrec’,
Voir par les Grecs. "

J’suis l’pornographe,
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.

Tous les sam’dis j’vais à confess’
M’accuser d’avoir parlé d’fess’s
Et j’promets ferme au marabout
De les mettre tabou…
Mais
Craignant, si je n’en parle plus,
D’finir à l’Armée du Salut,
Je r’mets bientôt sur le tapis
Les fesses impies.

J’suis l’pornographe,
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.

Ma femme est, soit dit en passant,
D’un naturel concupiscent
Qui l’incite à se coucher nu’
Sous le premier venu…
Mais
M’est-il permis, soyons sincèr’,
D’en parler au café-concert
Sans dire qu’elle a, suraigu
Le feu au cul?

J’suis l’pornographe,
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.

J’aurais sans doute du bonheur,
Et peut-être la Croix d’honneur,
A chanter avec décorum
L’amour qui mène à Rom’…
Mais
Mon ang’ m’a dit : " Turlututu!
Chanter l’amour t’est défendu
S’il n’éclôt pas sur le destin
D’une putain "

J’suis l’pornographe,
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.

Et quand j’entonne, guilleret,
A un patron de cabaret
Une adorable bucolique,
Il est mélancolique…
Et
Me dit, la voix noyé’ de pleurs :
" S’il vous plaît de chanter les fleurs,
Qu’ell’s poussent au moins rue Blondel
Dans un bordel "

J’suis l’pornographe,
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.

Chaque soir avant le dîner,
A mon balcon mettant le nez,
Je contemple les bonnes gens
Dans le soleil couchant…
Mais
N’me d’mandez pas d’chanter ça, si
Vous redoutez d’entendre ici
Que j’aime à voir, de mon balcon,
Passer les cons.

J’suis l’pornographe,
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.

Les bonnes âmes d’ici bas
Comptent ferme qu’à mon trépas
Satan va venir embrocher
Ce mort mal embouché…
Mais
Mais veuille le grand manitou,
Pour qui le mot n’est rien du tout,
Admettre en sa Jérusalem,
A l’heure blême,

Le pornographe
Du phonographe,
Le polisson
De la chanson.





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